L'année de leur rencontre en 1931, Pierre Fresnay et Yvonne Printemps étaient mariés chacun de leur côté : lui avec une actrice, Berthe Bovy, elle avec le célèbre Sacha Guitry. Après avoir divorcé, ils formeront un couple inséparable. Ils n'eurent d'enfants ni l'un ni l'autre, ni ensemble ni avec leurs conjoints précédents : à l'époque, on pensait que la vie de saltimbanques était incompatible avec l'élevage (oh, pardon, l'éducation) des enfants.
Pierre Fresnay (1897-1975) avait débuté à la Comédie-Française, Yvonne Printemps (1894-1977) aux Folies-Bergère où ses talents de danseuse et de chanteuse lyrique firent merveilles. Ils tourneront huit films ensemble, dont La dame aux camélias en 1934, Trois valses en 1938 et La valse de Paris en 1949.
La carrière de Pierre Fresnay éclipsa progressivement celle de sa compagne, avec des chefs-d'oeuvre tels que la trilogie de Marcel Pagnol (Marius, Fanny et César), La grande illusion de Jean Renoir en 1937 où il est inoubliable dans le rôle du capitaine de Boëldieu face à Erich von Stroheim, L'assassin habite au 21 et Le corbeau de Henri-Georges Clouzot durant la Seconde Guerre mondiale. Il faut citer aussi Monsieur Vincent en 1947, la vie romancée de Saint-Vincent de Paul, et ne pas oublier Les vieux de la vieille en 1960 où le trio qu'il forme avec Jean Gabin et Noël-Noël s'en donne à coeur joie.
Yvonne Printemps abandonnera le cinéma en 1951 pour se consacrer à la scène et au chant. Elle sera codirectrice, avec Pierre Fresnay, du théâtre de la Michodière. "Pendant une quarantaine d'années, Paris vécut au rythme du couple qu'il forma avec l'actrice et chanteuse Yvonne Printemps, amante puis persécutrice d'un homme dont le talent finit par dépasser le sien." En couple moderne avant l'heure (ou après l'heure), ils auront des aventures chacun de leur côté tout en restant ensemble.
Je me souviens d'une anecdote racontée par Michel Galabru qui avait joué à leur côté. Yvonne Printemps avait l'habitude de s'adresser à son compagnon en termes brusques et injurieux. Indigné, Michel Galabru avait dit à Pierre Fresnay : "Mais enfin, ne vous laissez pas traiter de la sorte !" et celui-ci lui avait répondu : "Là où vous entendez une insulte, j'entends un mot d'amour."